Cher parent internaute utilisateur de réseaux sociaux, j’ai de quoi à te dire…
Tu sais, être parent et l’afficher aux yeux du monde n’est pas chose simple. Véritables cours de justice, les réseaux sociaux voient défiler chaque jour des situations qui se font juger sans ménagement par l’opinion publique.
Parfois la grogne a du bon, parfois c’est destructeur. Même particulièrement destructeur pour les parents qui sortent des sentiers battus.
Récemment le dernier appelé à la barre des injustement-accusés: un homme qui publie une photo de lui, déposant un tendre baiser sur les lèvres de son bébé nouveau-né.
Les internautes se sont déchaînés avec des accusations ouvertes de pédophilie à un point tel que l’histoire a fait la manchette. Après avoir roulé des yeux avec tout le dédain que je pouvais alors éprouver envers l’humanité, je me suis résolue à démystifier ce geste dérangeant et pourtant ô combien naturel.
Il y’a de cela 60 ans c’était indécent de laisser paraître son ventre rebondi de femme enceinte par crainte de contaminer les non-mariées avec des idées pécheresses. Aujourd’hui les meurs paranoïaques s’attaquent à tout geste hors du commun, tout toucher surprenant par peur d’abus.
Voici donc ma lettre de soutien à ce papa qui aime sa fille.
Alors j’aimerais commencer ce billet avec un aveu terrible: c’est pareil chez nous.
Surtout lorsque ma fille était encore tout bébé. Son haleine me rappelait l’odeur des pêches. J’avais le nez collé sur sa bouche à longueur de journée à sentir l’odeur de mon bébé. C’est attirant, c’est enivrant cette odeur de bébé.
Et c’est tant mieux. L’odorat est un sens particulièrement mis à profit dans les jours qui suivent la naissance afin de créer des liens, créer le fameux lien d’attachement.
Mais de tous les sens, celui qui s’active le plus c’est celui du toucher. C’est par le contact de la peau avec celle de ses parents que le corps du bébé ajuste sa température. C’est par la peau particulièrement sensible de son visage que le bébé est capable de s’orienter vers le mamelon nourricier de sa mère. C’est grâce à la peau de ses lèvres que le réflexe de fouissement est possible chez le nouveau-né. Le contact cutané est également très déterminant dans l’établissement d’un système immunitaire efficace.
Et vous savez quoi? C’est important de stimuler ça. C’est TELLEMENT NATUREL de stimuler ça. Avec nos mains, avec nos lèvres, nous entrons en contact avec notre enfant qui a besoin de ces touchers affectifs.
Peut-être que les cours prénataux publics d’aujourd’hui sont bancals au point de louper ce passage crucial, mais il est important de réaliser le rôle du toucher dans une nouvelle famille de mammifère (humain ou non humain).
En effet, la plupart des mammifères ont un réflexe instinctif qui suit immédiatement la naissance de leur bébé; lécher le bébé. Bien plus qu’une première douche, cette pratique a pour but d’envoyer des stimulus aux récepteurs de la peau pour permettre au corps de mettre en marche les divers systèmes qui le composent. Les parents lèchent donc leur bébé du museau (pour activer des réflexes alimentaires) jusqu’à l’arrière-train (pour éveiller les mécanismes d’évacuation).
Il a même été clairement démontré, par les travaux du professeur James A. Reyniers sur le comportement animal, qu’un bébé que l’on empêche d’être léché et proprement stimulé par sa mère a plus de chance de développer des troubles reliés au système digestif. Pire encore, une autre étude, menée par Birch et ses collaborateurs, démontre que la privation du réflexe de léchage a une influence directe sur l’intérêt que porte la mère à ses petits.
Ça fait réfléchir non?
Les humains, comme la plupart des grands primates d’ailleurs, ont cependant développé de nouvelles techniques de stimulation cutanée néonatale grâce à leurs mains très développées. Nous on liche moins, on touche plus. Malgré quoi, il n’en demeure pas moins que le contact buccal avec le bébé nous est instinctif. (D’ailleurs, je me rappelle clairement avoir déjà léché ma fille dans les débuts de sa vie, pour voir ce qu’elle goûtait. Mon cerveau civilisé n’y pouvait rien. J’avais envie de goûter mon bébé. Finalement elle était sucrée. Toi ton bébé goûtait quoi?)
Parfois la nature met en place des systèmes que nous ne nous expliquons pas, nous animaux culturels, mais qui sont là pour des raisons cruciales.
Ce père est à mes yeux un super papa homo sapiens encore sous la gouverne d’un buzz d’ocytocine postnatal. Il est normal. Il est en train de vivre le coup de foudre parental.
Ça aussi c’est un mécanisme merveilleux de la nature, sans quoi les parents seraient indifférents à leur progéniture et le monde s’arrêterait là, faute de soins aux nouvelles générations. C’est vital de tomber amoureux de ses enfants.
Je lui lève mon chapeau à ce père tendre. Je n’ai pas de doute qu’un jour, sa fille verra en lui un protecteur, un confident, parce qu’ils auront pris le temps de développer un lien affectif, et ce, dès le début de leur rencontre.
Donc, à l’avenir, si tu croises un post un peu spécial, qui sort de l’ordinaire, d’un papa qui embrasse son bébé du bout des lèvres, d’une maman qui publie fièrement des photos de son allaitement ou encore un post de parent qui ne fait pas comme toi, ne les blâme pas.
Dis-toi que chacun suit son instinct et que la culture du toucher et du maternage n’est pas la même partout. À moins d’un danger évident pour l’enfant, si la publication te heurte, tu peux juste passer ton chemin et éviter d’ajouter ton grain de sel.
Bon allez, je t’embrasse, moi aussi! Continue ton bon boulot de parent et on se revoit sur les internets!
xx
Sources
MONTAGU, Ashley (1979) La peau et le toucher, un premier langage édition (Titre original Touching: The Human Significance of the skin), Éditions du Seuil.
SUNDERLAND, Margot (2016) La science au service des parents nouvelle édition, Canada: Hurtubise.
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